La possible contestation d’une OAP insérée dans un PLU

CE, 8 novembre 2017, n°402511

Par un arrêt en date du 8 novembre 2017, le Conseil d’Etat précise les conditions dans lesquelles la contestation des OAP (Orientations d’Aménagement et de Programmation) peut intervenir.

Ce qu’il faut retenir : Par un arrêt en date du 8 novembre 2017, le Conseil d’Etat précise les conditions dans lesquelles la contestation des OAP (Orientations d’Aménagement et de Programmation) peut intervenir.

Le Conseil d’Etat considère que seules les OAP susceptibles de justifier un refus d’autorisation d’urbanisme sont susceptibles de faire l’objet d’une contestation devant le Juge administratif, à l’occasion d’un recours pour excès de pouvoir introduit contre la délibération d’approbation d’un Plan local d’urbanisme (PLU).

Pour approfondir : Monsieur et Madame B ont saisi la juridiction administrative d’un recours contre la délibération d’approbation du PLU de Dammarie du 20 mars 2014.

Ce recours visait à obtenir, à titre principal, l’annulation de la totalité de la délibération, à titre subsidiaire, l’annulation de ladite délibération en tant que le PLU comporte des OAP qui incluent « dans les potentialités résiduelles du tissu bâti le secteur rue de Concrez/rue de la Rigauderie » le projet d’y construire un lotissement d’environ huit logements et, à titre encore plus subsidiaire, l’annulation de cette délibération en tant que ces OAP prévoient la possibilité de réaliser dans ce même secteur une sortie de ce lotissement sur les parcelles cadastrées section A n° 38 et 44 appartenant aux requérants. 

Par une décision du 31 mars 2015, les juges de première instance ont rejeté l’ensemble de leurs demandes. Puis, par un arrêt du 17 juin 2016, la Cour d’appel de Nantes a confirmé ce jugement.

Mais cet arrêt a fait l’objet d’un pourvoi, et le Conseil d’Etat, tout en confirmant la décision des juges d’appel, a été conduit à apporter certaines précisions.

Il résulte ainsi de la motivation retenue par la Haute Assemblée que, en application des dispositions de l’article L.123-5 du Code de l’urbanisme (codifiées depuis le 1er janvier 2016 à l’article L.152-1 du même code), les travaux et opérations d’urbanisme doivent être compatibles avec les OAP, lorsqu’elles existent, ce qui leur confère un caractère incontestablement contraignant.

Le Conseil d’Etat est néanmoins venu opérer une distinction entre les OAP dont la rédaction est telle qu’elle peut conduire à refuser un permis de construire, et celles dont l’imprécision ou l’absence d’intégration dans le PLU les prive de tout caractère contraignant.

Ainsi, dès lors qu’une OAP permet de fonder un refus d’autorisation, elle est susceptible de recours pour excès de pouvoir dans le cadre d’un recours contre la délibération approuvant le PLU, alors qu’une OAP imprécise, ne créant pas d’obligation, ne peut pas être contestée.

Poursuivant son raisonnement, le Conseil d’Etat considère par conséquent que l’imprécision de l’OAP faisait d’elle une simple « prévision » qui ne faisait pas grief aux requérants, et qui ne pouvait être assimilée à la création d’un emplacement réservé et ne constituait pas davantage une servitude au sens de l’article L.123-2 du Code de l’urbanisme (codifié depuis le 1er janvier 2016 à l’article L.151-41 du même code). L’orientation contestée dans cette espèce n’était donc pas susceptible de créer, par elle-même, des obligations pour les propriétaires des parcelles concernées.

Il est toutefois à noter que cela signifie a contrario qu’une OAP suffisamment précise, et susceptible de justifier un refus d’autorisation d’urbanisme, doit être considérée comme créant des obligations à l’égard des propriétaires et donc assimilée à la création d’un emplacement réservé et/ou d’une servitude.

A rapprocher : CE, 26 mai 2010, n°320780

Sommaire

Autres articles

some
Permis de construire et régularisation : qui doit payer les frais irrépétibles ?
Conseil d’Etat, 28 mai 2021, Epoux V, req. n°437429 […] le Conseil d’Etat est venu apporter une inflexion à sa jurisprudence concernant les frais irrépétibles dans l’hypothèse où le rejet de la requête dirigée contre un permis de construire fait suite…
some
Loi Littoral
Espace stratégique et convoité, le domaine public maritime est soumis à une pression immobilière et économique croissante. Longtemps, l’État, propriétaire de ce domaine et en particulier des plages, n’a en effet pas cru utile ou opportun d’intervenir, ce qui explique…
some
La présomption d’urgence de l’article L.600-3 du Code de l’urbanisme prévue pour la suspension d’exécution d’une décision d’urbanisme est réfragable
Conseil d’Etat, 26 mai 2021, n°436902 La présomption d’urgence prévue par l’article L.600-3 du Code de l’urbanisme au bénéfice des requérants sollicitant la suspension provisoire de l’exécution d’une décision d’urbanisme est une présomption réfragable.  Ce qu’il faut retenir : Par un…
some
Ne statue pas ultra petita le juge qui, saisi d’une demande de résiliation d’un contrat administratif, en prononce l’annulation
Conseil d’Etat, 9 juin 2021, CNB et M. A., req. n°438047 L’office du juge du contentieux contractuel n’est pas limité par la demande du requérant qui sollicite la résiliation d’un contrat : il peut en prononcer l’annulation. Ce qu’il faut retenir :…
some
La décision par laquelle la CNAC se prononce de nouveau après annulation d’une décision antérieure au 15 février 2015 est une décision, et non un avis
CE, 27 janvier 2020, 4ème et 1ère chambres réunies, n°423529 Par un arrêt en date du 27 janvier 2020, le Conseil d’Etat vient préciser que « (…) lorsqu’à la suite d’une annulation contentieuse d’une décision de la CNAC antérieure au 15 février…
some
Le critère de préservation et revitalisation du centre-ville introduit par la loi ELAN est-il conforme à la Constitution ?
Conseil d'État, 13 décembre 2019, Conseil national des centres commerciaux, req. n°431724 Par une décision en date du 13 décembre 2019, le Conseil d’Etat a transmis au Conseil constitutionnel une question relative à la conformité, à la Constitution, des dispositions…