Nouvelle sanction pour les sous-locations non autorisées sur le site AirBnB

CA Paris, 5 juin 2018, n°16/10684

Le locataire qui propose son appartement sur la plateforme AirBnB en violation de son contrat de bail doit verser au bailleur le fruit des sous-locations interdites !

Ce qu’il faut retenir : Le locataire qui propose son appartement sur la plateforme AirBnB en violation de son contrat de bail doit verser au bailleur le fruit des sous-locations interdites !

Pour approfondir : Tandis que pleuvent les décisions liées à la mise à disposition frauduleuse de sa résidence principale par un particulier (propriétaire ou locataire) à une clientèle touristique de passage, notamment au moyen de la célèbre plateforme AirBnB, la Cour d’appel de Paris a rendu, le 5 juin dernier, un arrêt susceptible de mettre en garde les locataires fraudeurs.

En l’espèce, un couple locataire d’un appartement du 5ème arrondissement de Paris, avait mis celui-ci en sous-location pendant près de trois ans sur le site AirBnB, au mépris d’une clause du bail interdisant toute sous-location sans l’autorisation écrite du bailleur (laquelle n’avait pas été consentie).

Le bailleur, dans le cadre d’une procédure de validation de congé pour reprise, avait également sollicité que lui soit versée la somme de 25 200 € à titre de dommages et intérêts au titre de la sous-location irrégulière des locaux, et 5 000 € au titre du préjudice moral causé par cette sous-location, la preuve de cette sous-location ayant notamment été apportée par des captures d’écran du bien proposé sur internet, et un procès-verbal de constat d’huissier.

Aux termes d’une décision qui pouvait laisser perplexe, le Tribunal d’instance avait en partie fait droit à la demande du bailleur en condamnant le locataire à lui verser 5 000 € de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral, mais n’avait retenu aucun préjudice matériel ou financier.

Mécontent de cette décision, les locataires ont interjeté appel, laissant ainsi l’occasion au bailleur de demander, en plus de la confirmation du jugement de première instance, la condamnation solidaire des locataires à lui verser les fruits des sous-locations irrégulières, soit la somme de 27 295 €, en réparation de son préjudice financier.

La nuance avec l’argumentation du bailleur devant le Tribunal d’instance reposait en l’espèce sur le nouveau fondement juridique invoqué à l’appui des prétentions de ce dernier, à savoir le droit d’accession issu de l’article 546 du Code civil, lequel permet au propriétaire d’une chose principale de devenir maître de la chose accessoire qu’elle produit (en l’espèce, les loyers issus des sous-locations).

La Cour d’appel rejette le préjudice moral du propriétaire, mais retient toutefois de façon surprenante le mécanisme de l’accession pour considérer que les loyers perçus par les locataires au titre de la sous-location (soit 27 295 €) sont des fruits civils de la propriété appartenant de facto au propriétaire, et doivent donc lui être remboursés.

Force est de constater que cette décision constitue un véritable frein pour les locataires fraudeurs.

En effet, ces derniers s’exposent, en cas de sous-locations interdites via une plateforme de location courte durée comme AirBnB, à une potentielle demande du propriétaire en remboursement des gains issus desdites sous-locations, ce dernier ayant dès lors tout intérêt à laisser la situation perdurer et à en rapporter la preuve pour en récolter les fruits.

A rapprocher : TI Paris, 5e, 6 avr. 2016, n° 11-15-000294 ; Article 8 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs ; Article 546 du Code civil

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