La loi ALUR ne s’applique pas pour un congé délivré et ayant produit effet avant son entrée en vigueur

Photo de profil - MILLIER-LEGRAND Chantal | Avocat | Lettre des réseaux

MILLIER-LEGRAND Chantal

Avocat

Cass. civ. 3ème, 1er décembre 2016, n°15-19.915

Les dispositions de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, modifiées par la loi ALUR du 24 mars 2014 ne s’appliquent pas à un congé ayant produit ses effets avant son entrée en vigueur.

Ce qu’il faut retenir : Les dispositions de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, modifiées par la loi ALUR du 24 mars 2014 ne s’appliquent pas à un congé ayant produit ses effets avant son entrée en vigueur.

Pour approfondir : En l’espèce, Mme X propriétaire d’un appartement loué à Mme Y depuis le 1er novembre 2004, pour une durée de six ans et reconduit jusqu’au 31 octobre 2013, a notifié un congé pour reprise de l’appartement prenant effet au 1er novembre 2013.

Se voyant opposer  la locataire un refus de quitter les lieux, la bailleresse a saisi le tribunal d’instance instance en validation du congé et à fin d’expulsion de Mme Y qui, quant à elle, lui opposait les nouvelles dispositions de l’article 15 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 issues de la loi ALUR instaurant la possibilité pour le juge, de procéder à un contrôle a priori de la réalité du motif du congé invoqué par le bailleur.

La Cour de cassation, confirme la position de la Cour d’Appel et retient que « le congé mettant fin au bail le 1er novembre 2013 avait été délivré le 26 avril 2013, et […] que les dispositions de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, telles que modifiées par la loi du 24 mars 2014 promulguée le 27 mars 2014, n’étaient pas applicables à la cause ».

Cet arrêt permet d’apporter de nouvelles précisions quant à l’application dans le temps du nouvel article 15 de la loi du 6 juillet 1989 tel que modifié par la loi ALUR, selon lequel, désormais, « en cas de contestation, le juge peut, même d’office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues au présent article. Il peut notamment invalider le congé si les motifs de reprise n’apparaissent pas justifiés par des éléments sérieux et légitimes ».

La question posée à la haute juridiction était celle de l’application immédiate ou non du nouveau dispositif légal.

L’article 14 de la loi ALUR prévoit que les contrats en cours à la date de l’entrée en vigueur de la loi restent soumis aux dispositions antérieures, à l’exception de celles limitativement énumérées, dont ne fait pas partie l’article 15 précité. Cette appréciation conduisait ainsi au rejet d’une application immédiate du nouvel article 15 de la loi du 6 juillet 1989.

Toutefois, un Avis rendu par la Cour de cassation du 16 février 2015 (n°14-70.011) pouvait semer le doute. En effet la Haute juridiction avait, considéré, dans son arrêt, d’application immédiate l’article 24 modifié de la loi du 6 juillet 1989, en dépit de toute mention dans la liste limitative de l’article 14.

La Cour de cassation met ainsi fin à l’incertitude planant sur l’application dans le temps de la loi ALUR.

A rapprocher : Article 15 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 ; Article 14 de la loi 2014-366 du 24 mars 2014 ; Avis de la Cour de cassation du 16 février 2015 n°14-70.011 ; CA Paris, 1er juillet 2014, n˚12/23120

 

cmillierlegrand@simonassocies.com

Sommaire

Autres articles

some
Palmarès 2021
Top 3 décisions de la Cour de cassation L’année 2022 venant à peine de commencer, la saison invite inévitablement à se retourner sur l’année écoulée et à faire un bilan. D’autant que les prochaines nouveautés – que l’expérience nous fait…
some
Valeur verte des immeubles et baux commerciaux
Dans quelle mesure un bailleur-investisseur ou un le locataire commercial ont-ils aujourd’hui respectivement intérêt à donner et à prendre à bail un bien performant sur le plan environnemental ? En d’autres termes, la « valeur verte » d’un actif permet-elle…
some
Application de la « loi Pinel » dans le temps : précision sur la date du « contrat renouvelé »
Cass. civ. 3ème, 17 juin 2021, n°20-12.844, FS-B « Un contrat étant renouvelé à la date d’effet du bail renouvelé », les dispositions du statut des baux commerciaux relatives aux charges, issues de la « loi Pinel » et de son décret d’application, applicables…
some
Nature du droit propriétaire commercial
Que distingue le droit de préférence du droit de préemption, de substitution et de propriété ? La nature du droit conféré au locataire d’un local commercial aux termes de l’article L.145-46-1 du Code de commerce revêt des enjeux de qualification juridique.…
some
La défense du droit de propriété face au droit de préférence
Le droit de préférence dont bénéficie le preneur à bail d’un local commercial aux termes de l’article L.145-46-1 du Code de commerce peut constituer, dans des cas extrêmes, une limitation préoccupante au droit de disposer du propriétaire des murs. Les…
some
Covid-19 et non-paiement des loyers commerciaux pour la période d’avril et mai 2020
CA Riom, ch. civ. 1ère, 2 mars 2021, n°20/01418 Si bailleur et preneur, en période de Covid-19, doivent, de bonne foi, se concerter sur la nécessité d’aménager les modalités d’exécution de leurs obligations respectives, les moyens du locataire – défaut…